25 mai 2010

Festival Seine de danse - Ballet du Grand Théâtre de Genève


Festival Seine de danse, à Puteaux

Blackbird (chorégraphie de Jiří Kylián)
Sechs Tänze (chorégraphie de Jiří Kylián)
Loin (chorégraphie de Sidi Larbi Cherkaoui)

Ballet du Grand Théâtre de Genève
Soirée du 25 mai 2010
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Soirée d’ouverture d’un festival audacieux. De la danse de qualité à prix placé en plein cœur du quartier de la Défense, que le côté hectique rend passablement irrespirable, il fallait oser, et ce que le très richement doté Conseil général des Hauts-de-Seine nous offre.

L’occasion de voir se produire une compagnie européenne prestigieuse dans un répertoire affriolant, qui tient toutes ses promesses.

Cette triple bill débute de manière étonnante. Un décor minimaliste - fond noir, néon vertical blanc -, des costumes réduits à des pantalons blancs, des musiques géorgiennes servent de cadre à une composition chorégraphique relativement austère. Si on aurait pu penser que les musiques choisies inspireraient une danse plus enlevée, Kylián s’en tient à une approche très sobre dans ce pas de deux dont les danseurs soulignent pour autant toute la poésie. C’est simple, efficace, ça fait retomber les tensions de la journée pour aborder détendu les fameuses Sechs Tänze…

Changement d’ambiance en effet avec cette deuxième pièce. On se retrouve dans le théâtre, dans le burlesque, dans l’emperruqué poudré irrésistiblement drôle, le gentiment grivois. Quel travail d’orfèvre le chorégraphe livre-t-il ici ! La retranscription dansée de la musique de Mozart est stupéfiante, chaque voix musicale trouvant son répondant dans la structure de la danse. Les danseurs se font à l’évidence plaisir, leur travail de pantomime témoignant d’une réelle appropriation de l’œuvre ; peut-il en être autrement avec une pièce aussi exigeante mais qui assure de tels moments de connivence avec le public ?
L'orage à l'extérieur du chapiteau tombe à pic pour accompagner les intermèdes entre les différentes pièces de Mozart et amplifient les grondements sourds prévus à ces moments-là par la chorégraphie originelle.
Il ne manque que les projections de bulles de savon lors du final, que nous avions trouvées du meilleur effet lors du dernier passage à Paris des Grands ballets canadiens de Montréal.

Deuxième partie de soirée à mille lieues des deux univers précédents (côté people, Patrick Devedjian, qui avait bredouillé en début de soirée une allocution brouillonne pour lancer les festivités, ne s’est même pas éclipsé à l’entracte, c'est plutôt bien). Loin, création de Sidi Larbi Cherkaoui pour le Ballet du Grand Théâtre de Genève, « s’interroge sur la distance entre les êtres, les époques et les cultures », nous apprend le programme. Le caractère orientalisant des décors (limités en l’espèce à de grands voiles orange dans le fond et sur les côtés de la scène) et des costumes (genre sarouels ou pantalons bouffants dans des couleurs pastel joliment assorties) se heurte à l’ambiance musicale baroquisante de la musique, au demeurant sublime, de Biber. Avec une danse tout en rondeur, tout en enveloppement perpétuel des bras et des corps, avec une gestuelle fluide d’une virtuosité larvée, non démonstrative et parfaitement restituée par des danseurs qui font là montre d’une synchronisation impressionnante, avec des intermèdes parlés ou chantés nous ramenant précisément à l’interrogation du programme en intégrant toutefois une distance humoristique de bon aloi, on ne voit pas les 47 minutes passer.
Tout cela donne bigrement envie d’aller découvrir l’intégrale du Triptyque du chorégraphe, qui sera bientôt donnée à la Halle de la Villette.

Pour l’anecdote, le public comptait un certain nombre de danseurs du ballet de l’Opéra de Paris, qui ont sans doute pu apprécier à sa juste valeur la prestation de cette compagnie, qui nous a charmé ce soir-là.
 

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